La pandémie continue de s'étendre rapidement dans le monde, affectant profondément la stabilité des systèmes économiques.
La première phase de la crise a largement réduit l'activité des entreprises qui ont subi deux chocs croisés : un choc de l'offre avec les problèmes d’approvisionnement depuis l’Asie et un choc de la demande avec la forte baisse de la consommation due aux mesures de confinement strictes mises en place dans la moitié du monde.
Alors que la progression de la pandémie dans l'Ouest de l'Europe a largement chuté depuis un mois et a été quasiment arrêtée en Asie du Sud Est, il convient aujourd’hui de réfléchir aux prochaines étapes potentielles de la crise.
Le rôle des cellules de crise et des responsables Continuité d'Activité est de se projeter sur des scénarios défavorables pour les anticiper au mieux avec des Plans de Continuité d’Activité adressant les bons risques.
Sur les mois qui arrivent, le risque de défaillance de tiers, que nous considérons comme relativement élevé, pourrait avoir des impacts importants sur la continuité d'activité des entreprises.
Dans un article intitulé "Vers une montée soudaine et mondiale des défaillances", la COFACE envisageait début avril une augmentation du nombre de défaillances de 25% dans le monde en 2020 par rapport à 2019 (+39% aux Etats-Unis, +15% en France), bien au-delà de la crise de 2009 (+2%), sans compter sur le risque d'une deuxième vague courant 2020.
Ce risque de défaillance ne s'est pas encore matérialisé en France grâce au soutien massif de l'Etat qui a estimé qu'il était important d'éviter des faillites d'entreprise pour pouvoir redémarrer au moment de la sortie de crise. Plusieurs facteurs laissent cependant entrevoir une augmentation possible du niveau de défaillance d’entreprises sur les mois à venir :
- Les moyens limités des Etats
Les aides d'Etat ont très sérieusement impacté les finances publiques. A titre d’exemple, l’INSEE estime que le ratio dette/PIB de la France devrait passer de 99% à environ 115% à fin 2020 sur base d’une durée de confinement de 2 mois. Le creusement du déficit public s'observe également dans la plupart des pays touchés par le Covid-19, dont les Etats-Unis, le Canada et la Chine.
Même si la France ne présente pas de problème de financement particulier sur les marchés, le niveau de dette présente un coût majeur pour les générations à venir, et ne pourra donc pas être augmenté indéfiniment.
L’irruption possible d’une 2ème vague, et donc d’un potentiel 2ème confinement ne permettra sans doute pas à l’Etat de soutenir les entreprises de la même façon qu’il l’a fait à l’occasion de la 1ère vague, avec un risque que la crise pèse d’avantage sur le bilan des entreprises.
A noter également que les Etats n’ont pas tous les moyens et les capacités de financement sur les marchés de l’Allemagne ou de la France, et n’ont donc pas tous les moyens de soutenir leur tissu économique aussi efficacement.
- La fermeture des frontières
Les restrictions au déplacement risquent de se prolonger tant que l’épidémie n’aura pas été drastiquement réduite dans les 150 pays touchés à date et que subsistent des risques d'importation de cas depuis l'étranger. Nous risquons donc de vivre pendant encore 1 à 2 ans avec des frontières fermées, ou avec des mesures de quarantaine à l'arrivée limitant drastiquement les possibilités de déplacement.
Ces restrictions ont un effet extrêmement négatif sur l’activité des entreprises de certains secteurs. Le secteur le plus atteint est le secteur aérien, avec une baisse estimée de 50% des voyageurs aériens sur 2020 d’après l'association internationale des transporteurs aérien. Sur 2020-2024, la demande en nouveaux avions devrait baisser de 40 à 60% par rapport aux estimations initiales d'après certains analystes. Les entreprises françaises (Thales, Airbus, Safran, Daher, Stelia, etc.) sont profondément atteintes avec des risque de défaillances en cascade.
De nombreux autres secteurs souffrent de la fermeture des frontières. C'est notamment le cas du secteur du tourisme (l’ONU s’attend à une baisse de 20% du tourisme cette année), l’hôtellerie, la restauration, les loisirs (musées, parcs d’attraction, etc.).
- La trésorerie réduite des entreprises
Malgré les aides importantes apportées par l’Etat, la trésorerie des entreprises s’est réduite sur les derniers mois. Cette tension sur la trésorerie les rend plus vulnérables aux aléas économiques, et notamment au risque d’un redémarrage en demi-teinte sur le 2ème semestre, d'autant plus que certains experts craignent que le niveau d’activité ne mette plusieurs années à se redresser pour de multiples raisons (restriction aux déplacements internationaux, mesures d'atténuation de la propagation de la transmission dans les pays, etc.)
Les entreprises les plus fragiles économiquement, ou celles reposant sur des montages LBO « serrés » risquent d’être touchées de plein fouet par les difficultés de trésorerie, avec potentiellement des risques de faillite.
A cela viennent s'ajouter les retards de paiement entre entreprises. A mi-mai, environ 3,5 factures sur 10 sont échues avec plus de 10 jours de retard en France, contre environ 2 sur 10 avant le confinement. Ces retards de paiement pèsent lourdement sur les comptes des entreprises les plus fragiles. Le crédit inter-entreprise (créances client des entreprises les unes envers les autres) représente 600mds€ soit 75% du crédit bancaire intermédié (800mds€), les enjeux sont donc très importants au niveau macro-économique.
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Le niveau d'incertitude
L'évolution de la pandémie présente un très haut niveau d'incertitude sur les prochains mois : extension incontrôlable de la pandémie dans certains pays ? ralentissement progressif grâce aux mesures ? identification plus ou moins rapide d'un vaccin (les estimations des experts s'étendent de fin-2020 à après 2021) ?
L'incertitude pèse toujours lourdement sur le climat des affaires. Dans un environnement incertain, les entreprises ont tendance à freiner brutalement leurs investissements, voire à licencier du personnel, comme ça été massivement le cas aux Etats-Unis. Ces mouvements brutaux peuvent être déstabilisant pour le tissu économique et fragiliser certains maillons des chaînes de valeur.
Au final, il existe donc une vraie inquiétude des économistes sur le risque de défaillance des entreprises, et tout particulièrement dans certains secteurs.
D’après un sondage récent réalisé par l'institut allemand d'études économiques Ifo, 52.7% des entreprises allemandes estiment qu’elles pourraient survivre 6 mois en cas de prolongation des restrictions de leurs activités et 29.2% pensent qu’elle ne survivront que 3 mois dans de telles conditions, alors que le tissu économique allemand est particulièrement solide.
La COFACE précisait dans son étude du mois d'avril que les pays émergents risquaient d'être particulièrement touchés étant donné la baisse du cours du pétrole et le retrait rapide des Investissements Directs à l'Etranger. L'analyse du risque de défaillance doit donc se faire avec un prisme pays et un prisme secteur.
Nous recommandons donc vivement aux cellules de crise des entreprises et aux responsables Continuité d'Activité de se préparer au scénario de défaillances potentielles de parties tierces (fournisseurs, prestataires de services, clients, partenaires stratégiques, etc.) via des Plans de Continuité d’Activité.
La méthode des Plans de Continuité d’Activité apporte une démarche structurée pour couvrir les risques d’indisponibilité. Cette méthode a largement fait ses preuves au cours des grandes catastrophes de ces dernières décennies.
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